Capgeris
Pouvez-vous présenter en quelques mots l'entreprise PSYA ?
Maria OUAZZANI
Psya possède une expertise de plus de quinze années dans le domaine de la prévention des risques psychosociaux et de l’assistance psychologique. Les consultants Psya (psychologues cliniciens, victimologues, assistants sociaux, psychologues du travail, sociologues, psychologues sociaux, ergonomes, consultants RH) interviennent en collaboration avec tous les acteurs de l’entreprise, sur les trois niveaux de prévention :
Tous les intervenants de Psya sont diplômés et soumis au code de déontologie de leur profession garantissant ainsi éthique et confidentialité.
Psya est habilité en qualité d’Intervenant en Prévention des Risques Professionnels (IPRP) et est membre fondateur de la F.I.R.P.S (Fédération des Intervenants en Risques Psychosociaux). Nous sommes présents à Paris, Lyon, Rennes, Bordeaux et Marseille, ainsi qu’en Espagne et en Italie à travers nos filiales à Madrid et à Milan.
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Vous êtes psychologue clinicienne de formation. Que signifie exactement psychologue « clinicienne » ?
Maria OUAZZANI
Le psychologue est un professionnel diplômé en Psychologie (Master 2 ou DESS de Psychologie) et ayant donc le titre de psychologue. Il existe plusieurs spécialités en psychologie (clinique, du travail, sociale,…).
Le terme « clinique » vient du grec qui signifie « au chevet du malade ». Le clinicien est celui qui, dans ce cadre, étudie le fonctionnement psychique sain ou pathologique de la personne au niveau cognitif et affectif. Il accompagne la personne en tant que sujet, pris dans sa singularité, son histoire et dans sa globalité. Il peut être amené à exercer en libéral ou en institution et dans des activités de psychothérapie ou de conseil. Selon ses spécialités, il intervient auprès d’enfants, d’adolescents, d’adultes ou de personnes âgées et dans des secteurs variés (hospitalier, médico-social, maison de retraite, entreprise,...).
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Pouvez-vous nous dire ce qui vous a poussé vers cette spécialisation dans l'accompagnement des aidants ?
Maria OUAZZANI
PSYA s’est appuyé sur une expérience de 15 ans dans l’accompagnement psychologique des personnes par téléphone et par internet pour construire un programme dédié aux aidants familiaux. Au travers de ce dispositif, Psya a souhaité avant tout reconnaitre la réalité des aidants familiaux, qui leur est bien spécifique.
Cette spécialisation de PSYA dans l’accompagnement des aidants est partie du constat qu’un aidant n’avait pas toujours « d’adresse » à son mal-être, ni « d’espace » pour le verbaliser. Dans le cadre des accompagnements psychologiques que nous réalisons par téléphone auprès de nos bénéficiaires, nos psychologues cliniciens reçoivent quotidiennement des appels de personnes en difficulté face à un évènement déstabilisant ou douloureux comme un deuil, un arrêt de travail, un mal-être professionnel, une problématique de couple ou de parentalité.
D’autres personnes ont pu contacter nos psychologues face à leurs difficultés liées à leur rôle d’aidant familial. Nous avons observé que l’aidant familial, qu’il soit principal ou secondaire, est souvent démuni parfois subitement face à la maladie d’un proche ou à sa perte d’autonomie.
La culpabilité face à la maladie ou à la perte d’autonomie du proche aidé, le manque de temps, la conciliation entre son rôle d’aidant et sa vie professionnelle ou familiale, l’évolution brutale de la maladie, la difficulté à prendre soin de soi et à demander de l’aide sont autant de spécificités exprimés par l’aidant. Souvent très engagé au quotidien auprès de son proche, celui-ci a parfois du mal à prendre du recul, à reconnaitre et donc à prévenir un éventuel état d’épuisement physique ou psychologique. C’est donc en nous basant sur nos expériences mais aussi au fil des rencontres avec des personnes spécialisées sur la question des aidants familiaux que ce projet d’un programme spécifique pour les aidants est né.
Capgeris
En quoi consiste la démarche de PSYA vis-à-vis des aidants ?
Maria OUAZZANI
Le programme AAA (Aide aux Aidants) de PSYA est issu de ce souhait d’apporter aux aidants un dispositif visant deux grands objectifs :
Ce programme, basé sur un auto-questionnaire est ouvert à tout aidant familial d’un proche dépendant qui souhaite faire un point sur son parcours et bénéficier d’un suivi psychologique ou social. Notre action préventive commence à partir du moment où l’aidant souhaite débuter cette auto-évaluation. En effet, nous savons que les aidants en recherche d’information, d’aide et de soutien le font fréquemment sur internet.
C’est dans cet espace déjà investi par les aidants que nous avons choisi d’insérer notre programme afin de lui garantir l’action la plus préventive possible. Le questionnaire, rempli par l’aidant, lui apporte un premier niveau de résultat, des préconisations pour préserver son bien-être ainsi qu’une proposition de prise en charge, si besoin, par un de nos psychologues ou un de nos assistants sociaux. Enfin, l’aidant est invité à créer son compte personnel pour avoir accès au questionnaire et à son espace personnel qu’il peut consulter à n’importe quel moment.
Capgeris
Quels sont les outils et méthodes déployés ?
Maria OUAZZANI
Le Programme AAA est basé sur un applicatif ouvert en ligne à tout aidant familial de personne âgée dépendante. Le questionnaire d’auto-évaluation utilisé dans le programme AAA est issu d’une démarche d’évaluation inspirée d’une méthodologie américaine qui a déjà fait ses preuves aux Etats-Unis. Ce questionnaire évalue à la fois les aspects relationnels, effectifs et objectifs de leur situation de l’aidant grâce à des questions ciblées.
L’applicatif AAA de PSYA propose donc à l’aidant d’y répondre et de s’appuyer, en fonction des réponses apportées, sur un premier niveau de résultats et de recommandations en ligne. Ces recommandations peuvent par exemple renvoyer à des conseils ou à des informations sur les aspects psychologique et social du parcours d’un aidant ou encore, si la situation le nécessite, à une proposition de bilan complémentaire avec un psychologue de PSYA. Cette proposition de bilan complémentaire, basée sur le souhait de l’aidant d’aller plus loin dans sa demande de prise en charge, s’effectue par téléphone avec un psychologue de PSYA qui pourra lui proposer un soutien psychologique individuel, un accompagnement social (avec un de nos assistants sociaux) ou un soutien de la cellule familiale (fratrie, parents, enfants,…).
Ainsi, passant d’une démarche d’auto-évaluation en ligne à une prise en charge avec un professionnel de PSYA, l’aidant peut progressivement s’approprier sa demande d’aide qu’il n’exprime pas toujours d’emblée ou qu’il n’avait pas toujours estimé comme utile pour préserver son bien-être au moment où il se connecte sur notre applicatif.
Capgeris
Votre démarche s'adresse-t-elle aussi bien aux particuliers qu'aux aidants professionnels (services à la personne, personnel de maison de retraite...) ?
Maria OUAZZANI
Le programme AAA est un dispositif dédié aux personnes en situation d’aidant familial. Les aidants professionnels (aide à domicile, infirmière, …) correspondent à une population bien différente de celle des aidants familiaux. En effet, bien que les aidants, qu’il soit familial ou professionnel, partagent un « socle commun » d’une relation d’aide quotidienne avec une personne dépendante ou malade, le rapport à l’aidé n’est pas tout à fait le même. En effet, la relation d’aide s’inscrit pour l’un, dans le cadre d’une relation et d’une pratique professionnelle et pour l’autre, dans le cadre d’une relation plus affective et familiale.
Nous accompagnons donc différemment les aidants professionnels. Les métiers tels que celui d’aide à domicile, d’auxiliaire de vie, d’aide-soignant,… confrontent le professionnel à la notion de souffrance, de maladie, de dépendance voire de fin de vie. Les aidants professionnels sont aussi sujets aux risques d’épuisement professionnel, d’agression ou de manque de reconnaissance. Nous accompagnons donc ces professionnels sur notre Centre d’Ecoute Psychologique afin de leur apporter l’espace nécessaire afin de verbaliser leurs difficultés. Enfin, nous pouvons aussi animer des groupes d’analyse de pratiques professionnelles, au sein d’une équipe de soignants, pour qu’ils puissent aborder collectivement les situations difficiles dans le cadre de leur pratique.
Capgeris
Vos interventions sont-elles individuelles ou collectives ?
Maria OUAZZANI
L’« auto-évaluation », le bilan complémentaire et le suivi psychologique et social du programme AAA sont des accompagnements strictement individuels car pour nous, chaque aidant est unique et chaque situation singulière.
Nous proposons par ailleurs une intervention collective familiale si besoin et dans des situations bien spécifiques de mal-être ou de « blocage » au niveau de la sphère familiale de l’aidant. Ces situations sont bien sûr moins systématiques et uniquement en face à face. Cela peut concerner par exemple une fratrie qui se retrouve brutalement en difficulté dans leur rôle d’aidant, ou concerner l’aidant, son conjoint et ses enfants tous impliqués dans la relation d’aide …
Capgeris
Concrètement, pouvez-vous donner quelques conseils pratiques à nos lecteurs dont certains sont en situation d'aidants :
Par exemple, comment peut-on gérer le stress ou l'agressivité de la personne aidée, sans dégrader la relation affective ou familiale qui lie aidant et aidé ?
Maria OUAZZANI
Ces tensions reflètent généralement une difficulté dans la relation aidant-aidé. Les tensions émotionnelles ou relationnelles, l’agressivité, les conflits peuvent fréquemment arriver dans la relation lorsque la perte d’autonomie est difficile à accepter, que la situation devient couteuse pour l’aidant ou que la dépendance s’ajoute à des conflits préexistants.
En effet, qui dit perte d’autonomie, maladie, dépendance à l’autre, dit pour l’aidé et son proche aidant, s’adapter à cette réalité qui suppose des remaniements profonds à la fois affectifs, individuels, relationnels et familiaux. Une personne dépossédée de son autonomie qui n’accepte pas cet état, ne peut accepter la relation d’aide voire la rejeter. Tout ceci doit se comprendre alors comme un comportement de défense face à la perte plutôt qu’un véritable geste de refus ou d’agressivité de la personne dépendante. Ainsi, l’aidant, pour faire face à l’agressivité de son proche aidé, doit pouvoir comprendre les enjeux sous-jacents. L’aidant doit alors pouvoir être sensibilisé à ce que peut ressentir son proche face à sa perte d’autonomie mais aussi à ses ressentis et défenses propres en tant qu’aidant. Ainsi, un des conseils à donner à un aidant est de pouvoir communiquer au maximum avec son proche et son entourage et de connaitre ses propres limites. Le but de la relation d’aide réussie est de pouvoir trouver, entre l’aidé et l’aidant, la meilleure distance qui prend en compte la réalité de la perte d’autonomie et qui soit aussi respectueuse de l’individualité de chacun.
Capgeris
Comment protéger la vie de l'aidant ?
Maria OUAZZANI
Chaque aidant doit pouvoir se préserver et se protéger. Nous pensons qu’un aidant, inscrit dans la relation d’aide peut rapidement se sentir envahi, voire « englouti », surtout s’il est isolé dans son rôle d’aidant. Il risque de ne plus prendre de temps pour soi, de ne plus préserver sa santé ou de veiller à sa vie familiale, de couple, sociale ou professionnelle…
Un aidant qui reste aidant est celui qui a réussi à trouver un équilibre entre « donner de soi » à l’autre sans s’oublier. C’est pour cela qu’un aidant qui se préserve est aussi un aidant qui peut le rester longtemps auprès de son proche. Pour répondre à votre question sur la façon dont on peut protéger un aidant, c’est en lui rappelant sans cesse de ne pas se négliger, de ne pas rester isolé et d’apprendre à réagir quand la situation devient lourde à porter. Protéger un aidant, c’est de pouvoir lui permettre de s’entourer et de s’informer. Enfin, protéger l’aidant c’est préserver aussi la relation avec son proche qui reçoit un réel soutien quotidien grâce à son aidant.
Capgeris
Un dernier mot à nos lecteurs ?
Maria OUAZZANI
Accompagner les personnes qui aident à leur tour d’autres personnes devient une nécessité. L’équilibre et le bien-être de l’aidant dépend des dispositifs mis à leur disposition pour les accompagner, les comprendre et les reconnaitre. La prévention de l’épuisement, de l’isolement, du mal-être est nécessaire et passe avant tout par une sensibilisation de tous les aidants à l’importance d’aller bien pour pouvoir aider l’autre, auquel nous participons chacun.
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